BIGGER aux Eurockéennes de Belfort / Copyright: Sandrine Torterotot (juillet 2019)
Bigger
28/07/2019

Jean-Louis Brossard, personnalité de la Culture et co-fondateur des Transmusicales de Rennes parle dans une interview de « l’élégance de leur songwriting »…  une éloge à l’attention de BIGGER, quintet formé par le chanteur irlandais Kevin Twomey et le guitariste Damien Félix (du duo Catfish).

À l’occasion des Eurockéennes de Belfort, nous les avons rencontré au bord de l’étang du Malsaucy pour un court entretien, rythme de festival oblige!

On était un peu en terrain connu car nous les avions déjà croisés il y a quelque temps à la Poudrière de Belfort, alors qu’ils venaient d’intégrer Iceberg, l’opération d’accompagnement portée par les Eurockéennes. Notre curiosité avait été piquée au vif par ce groupe qui avait déjà tout pour devenir bigger justement!

Tout d’abord, comment vous êtes vous rencontrés? Vous êtes nombreux et vous venez d’un peu partout…

[Kevin Twomey] C’est parti d’un projet laboratoire avec Damien où on testait plein de trucs parce qu’il faut savoir qu’on est amis depuis très longtemps. Il y a environ 4-5 ans, on se voyait, on écoutait des sons ensemble… et puis un jour, Damien m’a proposé un morceau qui s’appelait BIGGER et qui apparait sur notre premier EP. On a trouvé ça cool comme titre de morceau puis comme nom de groupe pour justement pouvoir imaginer quelque chose de plus « gros » émotionnellement. L’idée c’était de pouvoir se dire « si c’est bigger, c’est qu’on a réussi à franchir un cap ».

Pour un projet qui puisse prendre en puissance… aboutir ?

Oui, cette histoire là, c’est l’histoire de notre point de départ à Damien et moi. Mais il y aussi le reste du groupe. On se connaissait déjà tous de vue à la base.

On avait des amis en communs dans la musique et on recherchait un bassiste, un batteur, un clavier… nos collègues et amis on alors rejoint le projet. Damien, Ben, Antoine et Mike sont tous originaires de Franche-Comté. Moi, je suis de Dublin mais ça fait quelques années que je suis dans le Jura.

Après « Bones and Dust » en 2016, vous défendez votre nouvel EP « Tightrope » sorti en novembre 2018. Comment le présenteriez-vous … un EP « sur le fil du rasoir » ?

Effectivement, sur le fil du rasoir… parce qu’on évolue dans le milieu musical et qu’on ne peut jamais rien tenir comme acquis : ni le style, ni le succès. Bigger est à l’image de la vie : en recherche constante, en évolution, en équilibre et on sait qu’on peut tomber à chaque instant. En arrivant à Besançon, j’avais notamment vu le cirque Plûme. Sur scène, il y avait une californienne qui marchait sur une corde raide et cette expérience m’a inspiré. Pour cette femme, évoluer en équilibre, c’est son métier. Mais pour nous tous, c’est la même chose : la vie impose de faire des choix mais on marche toujours sur un fil sans avoir la moindre certitude.

Poétiquement, cette image d’être « sur le fil » on la retrouve aussi dans notre musique. Sur cet EP, on alterne assez souvent des ambiances sombres et éclairées. On ne reste jamais figé dans une seule atmosphère, au contraire, elles s’enchainent et se bousculent. Et si on abandonne un climat, c’est pour mieux y revenir à un autre moment.

Parmi les nombreux groupes émergents qui tentent de percer aujourd’hui, comment peut-on se faire une place au soleil? Quelle est LA particularité de Bigger?

Je ne crois pas que l’on se batte ou que l’on joue des coudes pour émerger. Pour l’instant, on fait ce qu’on aime. On est parti sur cette énergie de créer à la fois en studio durant les périodes où on compose et ensuite de venir défendre notre musique sur scène. On est heureux des choses qui nous arrivent, on a eu l’opportunité de faire de très belles dates et on continue aussi à en faire de plus petites. On a les crocs, notre motivation actuelle c’est de « manger de la date ». C’est ce qui nous obsède. Le reste, ça n’est pas notre boulot. Ce qui nous plait, c’est d’être ensemble, de faire de la musique et d’être sur scène. Tout le reste, c’est du bonus. Encore une fois, on ne se bat pas, on n’a rien calculé. On a envie de jouer le jeu mais on sait que c’est un métier et que la route est tellement longue. On regarde dans une direction sans fixer un objectif particulier, on veut seulement continuer à avancer de la manière dont on avance aujourd’hui.

On a compris que notre unique combat est avec nous-mêmes : c’est de toujours produire musicalement quelque chose qui nous ressemble. Et, c’est un combat réglé car on donne tout. On est passionné. Le but n’est pas d’être connu mais de faire la meilleure musique possible.

Mais par rapport au réseau SMAC ?

On a la chance d’être très bien entourés par une équipe solide. On travaille avec des gens qui sont installés dans ce réseau et c’est un gros coup de pouce pour nous. Mais, au-delà de ça, on produit une musique qui semble un peu plaire même si faire du rock, aujourd’hui, ça n’est forcément ce qui est à la mode! On a aussi la chance d’avoir un chanteur qui a un très bon accent anglais (rires). On reste aussi très concentré sur notre métier : composer et créer. Jusque-là tout va bien.

Vous avez pour référence un certain anglais, Nick Cave. À l’écoute de votre EP, cette influence ne saute pas vraiment aux oreilles et c’est du coup assez intriguant… alors, quels sont les liens entre Cave et Bigger ?

[Damien Félix] C’est une influence très importante pour nous. On ne veut pas faire une copie d’un Nick cave et de toute manière c’est impossible! Ce qu’on aime chez lui, ce sont les ambiances, les atmosphères qu’il peut développer… son côté ultra-présent et un peu « prêcheur ». C’est quelque chose que l’on retrouve chez Kevin, dans certaines de ses attitudes sur scène. Dans la musique que l’on écrit, cette influence se traduit par des couplets très « terriens » ou encore au travers de certains effets ou certains sons de claviers. Ça n’est pas l’évidence même et c’est tant mieux, car il n’y a qu’un Nick Cave !

 

Propos recueillis par: B. Baumeister
Photos: S. Torterotot